Imaginons l’Europe du XIXé siècle sans acier pour construire ses machines à vapeur, sans charbon pour les faire tourner. Il est alors probable que nos entrepreneurs auraient bien du mal à faire évoluer le monde et être les architectes de la première révolution industrielle.
Quel rapport avec l’intelligence industrielle ? A l’aube d’une révolution technologique qui redéfinira nos entreprises, nos sociétés et nos vies, le Vieux Continent semble aujourd’hui désarmé. Certes, il dispose de chercheurs brillants, d’ingénieurs talentueux et d’une intelligence scientifique de premier plan, mais il lui manque les fondements matériels de cette transformation : des puces électroniques dernier cri et en quantité suffisante pour bâtir le moteur de l’IA, ainsi que des géants de la taille des Gafam pour collecter en masse les données pour l’entraîner et l’améliorer.
Est-il déjà trop tard ? Avons-nous perdu la bataille face à ChatGPT, Google, Meta et désormais DeepSeek, ce nouvel acteur chinois qui fait trembler les géants occidentaux ? En réunissant à Paris un sommet mondial de l’IA, la France et l’Europe entendent affirmer qu’elles ne sont pas hors jeu. Mais, au-delà des discours et des grands principes, l’essentiel ne se joue t-il pas ailleurs ? L’Europe veut-elle se cantonner au rôle de régulateur en rédigeant les codes de la route des technologies conçues ailleurs ? Ou bien va-t-elle enfin comprendre qu’il est urgent de déverser des milliards et de faire tomber des barriéres pour se doter d’infrastructures dignes de ce nom, de favoriser les alliances transfrontalières, de faire émerger ses propres titans technologiques en les aidant massivement, en capitaux et dans l’accés aux données ?
Car l’enjeu dépasse largement la seule compétence économique : il s’agit d’une question de souveraineté. Un continent qui ne contrôle pas ses outils numériques devient dépendant, vulnérable, tôt ou tard une colonie numériques des puissances de la Silicon Valley ou de Schenzhen… Soyons réalistes, l’Europe ne peut pas passer à côté de la révolution de l’intelligence. Sa survie en dépend.
